Investir dans la R&D pour garantir le progrès économique

Eddy Mwilarhe | 27 Octobre 2020 | Opinion

La structure des économies modernes a connu d’énormes bouleversements au cours des derniers siècles. La première révolution industrielle a été à la base de l’une des plus grandes créations de richesse que l’humanité ait connue. La prochaine révolution économique est technologique et se déroule actuellement sous nos yeux. La R.D.C ne doit pas rater le train.

Lorsque le processus d’industrialisation des moyens de production a commencé à la fin du 18ème siècle, le Congo en tant que structure politique et entant que nation n’existait pas. Ce n’est donc pas un euphémisme que de stipuler que la R.D.C n’a pas participé à cette transition économique en ses premières heures. Elle a tout de même pu s’y joindre, quoique tardivement, et cela s’est reflété notamment avec l’établissement des entreprises minières du Katanga utilisant des technologies de production lourdes ou encore des usines textiles et brassicoles un peu partout dans le pays, qui ont contribué à l’une des périodes les plus réussies de notre expansion économique.

Figure I : La part combinée du secteur Agricole et Industriel dans la valeur ajoutée du PIB en RDC est largement supérieure à la moyenne mondiale (Source : BM, Mwilar)

Aujourd’hui cependant, alors que la machine de la croissance économique mondiale s’est tournée vers le secteur des services, l’économie congolaise présente encore les caractéristiques inquiétantes d’un autre temps : forte dépendance industrielle et agricole, beaucoup plus que la moyenne mondiale.

Aucune transition économique majeure des trois derniers siècles ne s’est opérée sans un investissement conséquent dans le capital, puisse-t-il être humain, industriel ou technologique.

Les miracles économiques des pays d’Asie de l’est et du sud-est, ayant conduit à la plus grande réduction de pauvreté de l’histoire de l’humanité, méritent bien que l’on fasse un parallèle. La Chine en particulier a réalisé un bond économique historique en un temps record, multipliant ainsi la valeur de sa production en devise nominale par 46 et en valeur réelle par 93, et tout ceci en une seule génération.

Les performances économiques chinoises ont été guidées par des campagnes de réformes profondes initiées par le secrétaire du parti communiste chinois d’alors, Deng Xiaoping, qui en 1979 a voulu un réajustement structurel tourné vers l’ouverture extérieure et la promotion de l’initiative privée. Ce qui a suivi ne peut être décrit que comme un déferlement hors normes des investissements intérieurs et extérieurs dans les capacités de production chinoises.

Figure II : La croissance vertigineuse chinoise a été accompagnée d’investissements massifs en capitaux fixes (En millions $)…

igure III : … Au point que le pays était celui qui allouait la plus grosse part de son PIB à la formation de capital (2018). Source: BM, Mwilar

Révolution digitale en marche

Le cycle de la dernière révolution économique est entrain de s’achever : l’automation des moyens de production n’apportent plus des rendements marginaux conséquents pour les entreprises, augmentant ainsi les coûts d’opportunité pour les revenus fiscaux des états. La prochaine révolution pour autant, a déjà débuté et se mesure sur des paramètres presque futuristes : 5G, Internet des objets, économie digitale, intelligence artificielle et virtualisation. La R.D.C n’a jamais su rattraper son retard technologique dans l’économie traditionnelle, elle se doit de ne pas rater l’élan de l’économie du futur.

La garantie d’une économie participative, tournée vers le futur se mesure sur les investissements entrepris dans la recherche et le développement, pilier fondamental de l’économie du 21è siècle. Sur ce point, le Congo fait déjà beaucoup moins bien que la plupart de ses partenaires économiques.

La R.D.C n’a jamais su rattraper son retard technologique industriel. Elle se doit de pas rater l’élan de l’économie digitale

Figure IV : La RDC dépense moins que la plupart de ses partenaires de la SADC en pourcentage de son PIB, et beaucoup moins que la moyenne de l’OCDE (Données 2015. Source : BM, Mwilar)

L’investissement dans la recherche et le développement ayant pour objectif de prendre le coche sur la révolution technologique se doit de se traduire par :

    • L’investissement dans l’amélioration de la fourniture des services internet & Télécom
    • L’établissement d’un cadre légal de régulation des services en ligne
    • La transition digitale des services publics
    • L’établissement d’un mécanisme public de financement et d’appui aux entreprises
    • L’établissement d’un cadre fiscal clair visant à favoriser l’allocation des capitaux privés vers la recherche et le développement
    • La création des pôles académiques visant à former, à conserver ainsi qu’à attirer les talents

Afin d’atteindre ces objectifs, la R.D.C devrait s’engager à allouer un minimum de 2% de sa richesse à la recherche et au développement, s’alignant ainsi sur le niveau moyen des pays de l’OCDE. Ces investissements favoriseront l’accumulation et la concentration des capacités de production, lesquelles permettront au capital humain ainsi créé d’établir les bases d’une création de richesse nationale intergénérationnelle. Un cadre légal stable et prévisible permettra de rassurer les investisseurs nationaux et étrangers, réduira les barrières de confiance et de perception associée à l’image du monde des affaires en R.D.C.

La deuxième révolution économique promet d’accroître de manière non-triviale la richesse des nations qui y participent de plein pied. La R.D.C peut encore en tirer pleinement profit et garantir une prospérité économique pour les décennies à venir.

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